Le souffle des morts qui ne sont pas morts !

Article : Le souffle des morts qui ne sont pas morts !
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16/10/2012

Le souffle des morts qui ne sont pas morts !

Thomas Sankara – copyright Miquel Garcia

Souvenir d’enfance qui se reveille! Voilà l’un des extraits de l’homme aux plumes brillants sénégalais, Birago Diop de « Le Souffle des Ancêtres » (du recueil « Leurres et lueurs », 1960, édition Présence Africaine) ». Je demande à son esprit de m’accorder le droit de publier quelques extraits de son œuvre. Je vous propose avant de continuer quelques vers de son poème :

« Le souffle des ancêtres morts

Qui ne sont pas partis,

Qui ne sont pas sous terre,

Qui ne sont pas morts.

Ceux qui sont morts ne sont jamais partis,

Ils sont dans le sein de la femme,

Ils sont dans l’enfant qui vagit,

Et dans le tison qui s’enflamme. »

Ce poème trouve sa place quant au passage sur terre de certains hommes. Ces hommes marquent à jamais le cœur des hommes après leur mort. Ils restent dans la mémoire collective. Hier 15 octobre, un peuple, un continent et une masse d’admirateurs du changement dans le monde, se rappellent non sans larmes d’un grand héros, d’une icône : Thomas Isidore SANKARA. Né le 21 décembre 1949 à Yako du mixage mossi et peul, il hérita une partie d’énergie de son père qui était un ancien combattant à la seconde guerre mondiale. Entré dans l’armée, il réussit une grande carrière grâce en partie à sa formation reçue d’officier à l’Académie Militaire d’Antsirabe à Madagascar. Il  démissionna en 1980, de son poste de Secrétaire d’État à l’Information au sein du Comité militaire de redressement pour le progrès national dirigé par le colonel Saye Zerbo en déclarant la célèbre citation : « Malheur à ceux qui bâillonnent le peuple. »

En mai 1983, il devint Premier ministre du commandant Jean-Baptiste Ouédraogo, le chef du Conseil de salut du peuple. Il réussit un coup d’Etat et prend la tête du conseil national révolutionnaire. Tribun hors commun, il mit en place son programme anti-impérialiste suite à une analyse objective de la situation de son pays. Cet homme a pu en trois ans de gouvernance apporté de résultats concrets. Ayant constaté l’ampleur de la corruption dans son pays, la faible place accordée par sa société aux femmes, il mena la politique du simple et responsable. Il veut rendre digne son peuple et s’oppose à ceux qui sont contre cette voie : « donner un sens aux révoltes grondantes des masses urbaines désœuvrées, frustrées et fatiguées de voir circuler les limousines des élites aliénées qui se succèdent à la tête de l’État et qui ne leur offrent rien d’autre que les fausses solutions pensées et conçues par les cerveaux des autres. Il nous faut donner une âme idéologique aux justes luttes de nos masses populaires mobilisées contre l’impérialisme monstrueux ». Montrant l’exemple en utilisant les choses quotidiennes, il révolutionna tout le pays en faisant des femmes, les véritables acteurs du développement. Il prévoyait des sanctions à l’égard de ceux qui par leurs actes essayaient d’encourager la corruption. Aussi a-t-il pu atteindre l’autosuffisance alimentaire, en ouvrant la voie au développement et non des seuls champs de combat. Pour cela, il fit une importante réforme agraire. Aussi, le nom du pays ne reflétant pas l’idéal qu’il veut pour son pays, il changea son nom à travers deux des langues burkinabé : Burkina en Mooré (Mossi)= Hommes intègres et Faso en Dioula=Pays ; d’où le pays des hommes intègres. Il choisit pour devise : « La patrie ou la mort, nous vaincrons. » Son intégrité était incontestable et il en exigeait autant de son peuple, Il réduisit le salaire des fonctionnaires et le sien afin de faciliter l’accomplissement de son idéal. Il roula dans la voiture de pauvre (Renault 5) et dormit dans le bâtiment de pauvre. Sa simple photo faisait rappeler la sincérité chez ses compatriotes. Il condamna fermement les méfaits des impérialistes et refusa toute attitude complice à leur égard. Cela s’est vu dans ses discours et pratiques. Aussi la santé et l’éducation ont-ils été érigés en de véritables priorités. Ainsi, il interdit l’importation de certains produits alimentaires, organisa des campagnes de scolarisation et de vaccinations (à travers ce projet, il reçut les félicitations de l’Organisation mondiale de la santé). Il condamna fermement la polygamie en luttant également contre l’excision.

Par rapport à la dette de son pays et de celle des autres pays, il encouragea ses pairs à ne pas payer. Par rapport au marché africain, je vous laisse lire son discours de juillet 1987 à l’OUA (actuellement UA) calmement : ‎ »Faisons en sorte que le marché africain soit le marché des Africains: Produire en Afrique, transformer en Afrique et consommer en Afrique. Produisons ce dont nous avons besoin et consommons ce que nous produisons au lieu d’importer. »

Thomas SANKARA a été assassiné par son « frère » d’arme et de jeunesse le 15 octobre 1987, Blaise Compaoré, le succédant. Ce dernier est au pouvoir jusqu’aujourd’hui. Sankara est mort mais devient au fil du temps plus vivant. Des conférences, de débats et de concerts sont organisés en son honneur et son hommage. Des jeunes qui se réclament de lui et l’acclament au tréfonds de leur cœur. Des tentatives répétées de lui rendre justice : sur le site qui lui est dédié : actuellement 10000 Signatures de par le monde pour réclamer « Justice pour Thomas Sankara, Justice pour l’Afrique ». Différemment de beaucoup de putschistes, il fit pour son pays et pour l’Afrique ce qu’ils en avaient besoin. Les morts ne sont pas forcément morts, il y en a qui meurent physiquement mais leurs idées ne meurent jamais.  Il incarne à côté des autres, du panthéon d’une jeunesse cherchant une identité panafricaine, Patrice Emery Lumumba, de Kwame Nkrumah et autres, de l’espoir pour le continent. Leurs œuvres doivent être étudiées afin de permettre d’écrire une histoire digne de l’Afrique.

Par votre concitoyen du monde, M. KABA Kono7

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Commentaires

cireass
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Sankara restera à jamais dans le coeur des Africains épris de liberté et justice ! #RIPThomas